| d21 | Result |
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DÉTOURNE DES IMAGES CLICHÉS Prends des termes qui sont des lieux communs (un arc-en-ciel, une femme est une rose) et transforme-les pour te rapprocher des champs lexicaux de Millevaux (un arc-en-terre, une femme est une ronce). Essai 1 (images clichés non retouchées) : Quand les lys à fleur de peau s'enclosent entre chien et loup et que la belle-mère de l'enfant prodige ferme les rideaux pour cacher l'orée la bougie dessine un arc-en-ciel dans les yeux mi-clos Essai 2 (millevalisé) Quand les lys à fleur d'écorce s'enclosent entre goupil et sangleloup et que la laide-mère de l'enfant vestige ferme les rideaux pour exorciser l'orée la bougie dessine un arc-en-terre dans les ocelles mi-closes |
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IMAGINE QU'IL FAIT PRESQUE TOUJOURS NUIT Le jour est la rareté, le soleil est l'exception. Les saisons bloquées sur un éternel automne, le couvert des feuillages et des épais nuages, mais aussi un semblant de surnaturel plongent Millevaux dans une nuit, sinon éternelle, du moins toujours plus longue que le jour. Le jour est décrit en trois étapes (aube, zénith, crépuscule) tandis que la nuit a droit à cinq étapes (presque-nuit, grasse-nuit, noire-nuit, nuit brune, presque-aube). Sous le tapis des ramures nocturnes des yeux blancs pour seuls phares couches et couches de ténèbres recouvrent le feu quand la noire-nuit engoule la grasse-nuit dans son frisson corvin l'obscurité étend ses ailes ne nous laissant que phosphènes pour éclairer nos songes sombre comme dans le cul du loup est notre marche d'isolation sensorielle en vantablack marc absolu |
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CACHE LE SENS MÊME À TOI-MÊME En ne cherchant pas trop à dire à ni à comprendre quels sont tous les tenants et les aboutissants de l’histoire que vous racontez, vous laissez une chance au public de la détourner. C’est l’histoire d’un coteau où ne se perd dans la langue du matin cette rumeur renard qui court en sens et dans l’autre jusqu’aux prémisses de la grande floraison |
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UN SEUL THÈME MAIS TOUJOURS EN MOUVEMENT Pense aux verbes d’action et aux termes de localisation où les rémiges frémissent quand les ténèbres froissent à la plongée à travers le ciel et l’arbre qui craille à fleur de chair et s’ébroue terre et bras le frôlement d’une poitrine le regard tour à tour jaune et bleu Corax entr’aperçue |
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CONCENTRE-TOI SUR CES TROIS ÉLÉMENTS : TERRE, FAUNE, FLORE qui couvre dans les tunnels qui croît à travers glaise qui fouisse entre racines qui germe de tout alluvion becs et pousses, gueules et coiffées de farine noire de la mort et dans son ventre même la vie ne cesse |
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ACCOLE DES MOTS PRÉCIEUX À DES MOTS TRIVIAUX Limite l’emploi de mots précieux ou scientifiques au registre de la terre / faune / flore où poussent les bryophytes qu’en pensent les épidermes de fourmis en cordycepts la vigne du sang versé jamais cet hémolyphe ne trahit des abdomens insectes à l’ichor des fées qu’une coupe histologique aussi vrai la pédologie des sentiments |
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ÉCRIS UN PERSONNAGE QUI SOIT NARRATEUR DU POÈME Tire une image LIEN ou une mission de vie LIEN ou utilise un ancien personnage. Mon personnage : Goràn Prebojnic, un berger serbe qui envoie ses troupeaux paître autour des spomeniks, tout en surveillant les frontières. né du feu d’une cigarette pour mourir à la presqu’aube ce moment de sourde éternité à scruter la lisière des tréfonds assis parmi ce bêlement offert la pierre a perdu toute forme et tout sens dissoute dans la toux de ma propre peur |
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CLAME LA RUINE Décris des décombres. Des reliques du temps ancien vidées de leur sens. Le texte s’effondre sous son propre poids. La paranoïa et le délabrement mental se répandent. La vision du monde est décliniste. Le temps d’avant est idéalisé. Le registre de langage se dégrade. Des termes modernes se mêlent à un contexte post-technologique. Les monuments du passé sont vides de leur sens et méconnaissables. un crépuscule à ground zero dans la forêt des pylônes de lierre la lèpre des murs les compteurs geiger et cette photo délavée de toi que je n’ai pas connu e dans la friche des c’était mieux avant la boîte à musique et ce billet froissé que je collecte en pure perte allez tous tes vous faire enfoirer |
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CLAME LA FORÊT Le végétal s’insinue partout. Beaucoup de notions sont manifestées sous forme de forêts, de massifs, de maquis. La faune, la flore et la terre prennent plus de place que l’humain. L’espace se resserre et s’engorge. Coït, naissance, croissance et mort. les pots de fleurs ont débordé une douche de racines et ma porte un roncier cette lettre que j’ai voulu t’écrire a prise sève et buissonné et sous les lattes du parquet scolopendres et crustacés je pleure des cladonies sur la forêt de mon logis |
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CLAME L’OUBLI L’amnésie gagne la narration, mais paradoxalement le thème de la mémoire est aussi important. Des souvenirs ou des épisodes du passé sont associés à des objets. La forêt contamine le passé. La confusion s’installe. Les vers se répètent, peu à peu déformés. De larges espaces et silences s’ouvrent. L’angoisse existentielle s’approfondit. La grammaire se déstructure. s’il est au jour ne si de cette nuit quant à lors de nos les dernières phrases rencontres fougères et ton regard emporté e dès que le remords n’emporte le regret |
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CLAME L’EMPRISE L’humain en animal, végétal et minéral. Des transformations, métamorphoses et transitions de toutes sortes sont évoquées, tantôt sur un ton neutre, extatique ou horrifié. L’identité n’est qu’un leurre. Le décor se morphe. Les lois de la physique n’ont plus court. Des mots s’associent à cause de leur ressemblance. Le texte se déforme (jouer avec les taille et la police des lettres, mélanger les langues). Les cinq sens sont confondus dans un chaos synesthésique. au marché des mollusques dans la mangrove écartelée une pomme dans ma main l’une aragne et l’autre pierre je croque les sabirs et les pidgins que mille gueules en allées mille sbeuls et mille junkyards ma tErreur et mΞs eRrEur s JE sOMM E S |
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CLAME L’ÉGRÉGORE La narration évoque peurs, croyances et émotions. On puise au registre du surnaturel. Les hantises du narrateur prennent forme. Tout est habité, chamanique et sorcier. La religion est présente, tour à tour incantatoire, exorciste ou dévoyée. Les cauchemars envahissent le réel. cette auto-stoppeuse et ce carrefour la galerie de la forêt sur nos têtes et les reflets sur son visage rétroviseur et crucifix toujours observé e l’enfer des banquettes arrière et cette fosse dans le coffre |
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CLAME LES HORLAS Abondance de monstres et de créatures issues du folklore. Êtres qui se transforment vers l’animal ou vers l’humain. et alors tu verras il te transformera le plus beau des horlas des écailles et des doigts des écorces et des bras tu te difformeras en ce qu’il te plaira aboli ce qui te sépara de l’autre et de toi des gerçures et des émois des blessures d’effroi car enfin te voilà le plus beau des horlas |
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FAIS GERMER L’ESPOIR SUR LE PIRE DES TERREAUX Tout post-apocalyptique qu’il soit, l’univers de Milleaux porte des promesses de meilleurs lendemains, que ce soit par la renaissance de la nature avec laquelle vivre en symbiose, la possibilité de rebâtir une société plus juste sur les cendres de l’ancienne, ou la perspective d’accéder à une nouvelle nature en se transformant en horla, ou plus individuellement par des destins croisés d’amour ou d’amitié. les charniers finissent toujours par pourrir les petits tyrans se mangent entre eux ne pleure pas la fin du monde si c’est la fin de ce monde tout repoussera et nous repousserons au milieu les rejets farouches d’une société gangrénée après la nuit vient le grand soir |
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DONNE UN APERÇU D’UNE SITUATION PLUS VASTE Imagine un contexte ou une intrigue d’une certaine ampleur, ou encore reprends celle d’une campagne Millevaux que tu as lu ou jouée ou d’une autre fiction existante, remise à la sauce Millevaux. Compose un poème du point de vue d’une personne impliquée dans cette intrigue ou d’une personne qui la relaterait. Suggère des instantanés de cette intrigue sans prendre la peine de résume la trame générale. Ici, un poème inspiré de la geste du Roi Arthur : celle dans le rocher et celle dans nos cœurs celle du lac et celle des bois venus de la fonge et du nord ceux qui nous envahissent dans les ruines de la forteresse les copeaux d’une table et dans les souterrains de la mémoire sous la mousse une coupe |
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BASE TES FIGURES DE STYLE SUR LE VERTIGE LOGIQUE Les réalités interagissent entre elles, les personnages vont de réalité en réalité ; les réalités se confondent ou s’imbriquent, on ouvre des passages vers le temps et l’espace, la transgression de la logique par les forêts limbiques s’étend au monde entier. LIEN j’ai plongé la tête dans l’arbre creux de ma mémoire pour voir où en étaient mes souvenirs et y danser une dernière fois j’ai reçu un message du futur qu’écrivit un amour passé j’ai suivi les racines fatidiques jusqu’au terreur où ils se plantèrent fait de mes rêves et de mes espoirs autant de forêt à visiter et d’où s’échappent des horlas |
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EMPLOIE DES NÉOLOGISMES BIOLOGIQUES La vie organique a pris tant d’importance que le langage pour la décrire s’est étoffé. Forge de nouveaux mots à partir de termes biologiques ou organiques pour laisser entrevoir toute une nouvelle étendue du vivant dont toi-même ignores le sens. Altère des mots, mélange-en, fais des mots-valises, joue avec les racines gréco-latines. au creux de ses blessaies l’utérieur à façonner dans ses soupirs vivophages le chronopendre étire ses crandibules plis de vorgnes et vomissures amour naissant de la fumure rêves du scarabée-ébène voilà qu’iel attend en mussant sous ses élytres le trésor insoupçonné des métaspores |
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FAIS DE L’ÉTRANGE UNE SECONDE PEAU Les personnes ont des comportements contre-intuitifs. L’environnement est altéré de façon indéfinissable. Un trouble envahit le narrateur. Les végétaux ont une pousse anormale. Les animaux font des choses inhabituelles. Les règles de l’espace et du temps sont presque imperceptiblement transgressées. l’autre jour ou était-ce jadis j’ai mangé e avec mon adelphe ou était-ce avec une fourchette un plat de feuilles blettes et liquoreuses qui refusaient de moisir elles avaient un goût de cette fois que je ne saurais définir quand ce chien m’a mordu e en voulant m’embrasser dans ma chambre comme un entonnoir où les lianes sont tapies ce visage dans le miroir est-il meurtri est-il ravi quand j’y pense de te revoir ça m’a plutôt surpris e |
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ADOPTE UNE ÉCRITURE PANORAMIQUE Scanne les environs avec un œil angoissé. Tente de deviner ce qui se trame au-delà du mur végétal. Monte aux arbres pour embrasser le paysage. Rampe au niveau des insectes. Zoome sur les détails. Passe la tête sous terre. ce qu ‘on voit remuer entre les lames du feu ces compagnons de voyage incertains qui se cure l’ongle avec son couteau et qui grignote un pain de moisissure les regards sous le rideau d’arbres et au-dessus de nous les ailes ailes qui épient sur la crête des sylves montagneuses un cloporte sur l’épaule et sous nos pieds nourrissant les vers ceux qui nous précédèrent |
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MÊLE L’UNIVERS DE MILLEVAUX À UN AUTRE CONTEXTE L’univers de Millevaux n’est pas localisé de façon précise ni dans l’espace ni dans le temps. Toute uchronie ou translocation sont possibles. Choisis un contexte (lieu, époque) et mélange le champ lexical de ce contexte à celui de Millevaux. nous marchons à travers taïga depuis si longtemps que nos pieds oubliés et parfois un souvenir nous réchauffe comme un samovar une matriochka d’histoires aussi petites que véritables une embrassade dans une isba le rire de Leonid ou l’odeur des petits pains farcis mais maintenant il n’y a plus que la menace des fusils la scansion de la doctrine les fosses à creuser et le gémissement des roussalkas au cœur du monde emprisonné |
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LAISSE-TOI COULER DANS LE CHEMIN DE MOINDRE RÉSISTANCE Comme une goutte d’eau de feuille en feuille, oublie la notion de qualité. Abandonne-toi à l’idée préconçue que tu te fais de Millevaux. Ton plan, c’est de ne pas en avoir. Avance avec la certitude que chaque mot appellera le mot suivant naturellement. fleur de fumure nourricière et familière emporte les chants de ma vie et de mon village entre les troncs noirs fûts de goudron ce qui se passe et ce qui présage entremêlés comme le chant de la huldre dans la pinède ensommeillée |